Les propositions de loi présentées par les députés FCC Aubin Minaku et Garry Sakata continuent de défrayer la chronique, suscitant des réactions dans tous les sens.
En marge du 60ème anniversaire de l’indépendance, Ouraganfm.cd a approché un ténor de la majorité présidentielle, M. Samy Badibanga Ntita, leader du Regroupement politique «Les Progressistes», mais aussi premier vice-président du Sénat, pour avoir son opinion.
Ci-dessous l’intégralité de cet entretien
Après les militants de l’UDPS, l’opposition Lamuka, le syndicat des magistrats, l’église catholique, c’est au tour du président de la République de se prononcer contre les propositions de loi présentées par les députés Aubin Minaku et Garry Sakata. Quelle est votre opinion sur cette crise ?
Ces propositions sont inopportunes car rien ne justifie en ce moment un chamboulement du système judiciaire du pays. Vous l’avez dit vous-même : elles recueillent, à l’évidence, un désaveu général. Dans l’intérêt de la stabilité du pays en ces moments difficiles d’état d’urgence dû à la pandémie de la Covid 19, il est hautement souhaitable qu’elles soient retirées par leurs auteurs. Plus que jamais, le pays a besoin d’unité et de rassemblement autour du chef de l’Etat, car pour le moment, l’ennemi principal s’appelle Covid 19 contre lequel nous devons mobiliser toutes nos forces dans l’unité de tous.
Mais, est-ce que cette crise ne démontre-t-elle pas la faiblesse d’une majorité fissurée par les guéguerres entre ses deux composantes, le FCC et le CACH ? Comment une majorité peut-elle gouverner un pays si elle est à ce point déchirée ?
C’est exact, mais il n’est pas trop tard pour ressouder les morceaux. La majorité doit développer cohérence et solidarité. Prenons l’exemple de la France qui dispose d’un modèle institutionnel dont s’inspire le nôtre. Il existe là-bas une tradition que l’on appelle « petits déjeuners de la majorité ». Il s’agit d’un rendez-vous, tenu les trois premiers mardis du mois à l’Hôtel Matignon, leur primature, autour du Premier ministre, et le dernier mardi du mois autour du président de la République. Ces réunions regroupent ainsi autour du président de la République et du chef du gouvernement tous les ténors de la majorité parlementaire, c’est-à-dire les présidents et vice-présidents des deux chambres du parlement, les présidents de tous les groupes parlementaires de la majorité au sénat et à l’assemblée nationale, ainsi que le ministre des Relations avec le Parlement. On peut y convier des ministres intéressés par une question sectorielle. Je plaide pour l’instauration de cette pratique chez nous en l’adaptant, bien entendu, à notre contexte.
Quel serait l’avantage de l’institution d’une telle pratique en RDC ?
Il y a plusieurs avantages ! D’abord, ce genre de réunions permet aux membres de la majorité de cultiver la solidarité en leur sein et de travailler en cohérence avec le pouvoir exécutif qu’ils soutiennent. Ensuite, la majorité parlementaire est en permanence imprégnée de la vision du chef de l’Etat, et du cap imprimé par le gouvernement. Les besoins éventuels en réformes sont discutés aussi bien entre les parlementaires qu’entre ceux-ci et les deux têtes de l’exécutif. De sorte que les propositions de loi présentées par les députés sur les questions essentielles font consensus avant leur présentation et sont portées par tout le monde au sein de la majorité parlementaire. Cela éviterait donc les incompréhensions auxquelles nous avons assistées ces derniers jours, dues au fait accompli. Je plaide vivement pour la cohérence et la solidarité au sein de la majorité et j’ai espoir que nous allons y arriver.
Autre point de friction, la désignation du président de la CENI. Quelle est votre opinion sur cette question ?
Nous devons tous tenir à des élections réellement libres, démocratiques transparentes. Pour cela, je soutiens qu’il faut d’abord porter les réformes sur la loi organique régissant la Commission électorale nationale indépendante avant d’aborder la question des personnes qui vont la diriger. Pour des questions de crédibilité, de transparence et de confiance, il faut une personne nouvelle. Les confessions religieuses devront trouver un consensus pour la désigner. Si elles en arrivent au vote, s’ils ont des jeux d’intérêt géopolitiques ou autres comme nous les hommes et femmes politiques, alors là, on se demandera si ça vaut la peine de continuer à leur faire confiance pour la désignation du président de notre centrale electorale.